7 principes fondamentaux
1. L’intervention précoce intensive
L’intervention précoce intensive s’appuie sur la plasticité cérébrale de l’enfant et la quasi-absence de handicaps surajoutés. Le but est triple; il s’agit d’améliorer les chances de limiter les effets désorganisateurs du handicap sur le développement, de favoriser la mise en place de processus adaptés et de prévenir l’apparition de handicaps secondaires. Nous observons, à des degrés différents, que la difficulté à capter le monde extérieur – du fait de troubles liés à l’intégration des informations provenant des sens, les perturbations entre le perçu et les structures de l’émotion, l’impossibilité de pouvoir établir des échanges communicatifs, de comprendre et de répondre aux sollicitations extérieures – orientent l’enfant avec autisme vers un isolement du monde extérieur et des relations.
Par intervention précoce intensive, nous souhaitons que:
– L’enfant bénéficie le plus tôt possible d’une intervention éducative spécifique dès l’apparition des premiers symptômes observables.
– Le nombre de séances et la qualité des soutiens soient élevés pendant les premières années de l’enfance, pour permettre des changements qualitatifs dans le domaine de l’apprentissage, de la communication, des échanges sociaux réciproques et de l’enrichissement du répertoire d’intérêt.
Vu la précocité de l’intervention, notre programme prend en compte la globalité de l’enfant avec son environnement familial.
2. Les processus intégrés dans des contenus significatifs
Les modèles d’éducation cognitive ont la particularité d’être centrés sur les processus en lieu et place des contenus. Le programme d’éducation cognitive pour enfant avec autisme vise également à articuler les contenus avec les processus pour favoriser la mise en place d’apprentissages qui ont du sens. Cette intégration est essentielle car elle va dans le sens d’acquisitions utiles à l’adaptation de l’enfant, et augmente ainsi les chances de leurs applications dans le quotidien. Les processus fortement activés sont ceux qui se trouvent à la base du langage, les structures permettant les apprentissages (observation, imitation, contact visuel, attention sélective, régulation émotionnelle, mentalisation et conduite de buts, pensée logique). La démarche est directive ou semi-directive pour réduire les risques de schémas de fonctionnement inadapté de la pensée et favoriser les démarches spontanées de l’enfant. Un estompage progressif est mis en place lors de chaque conduite.
3. La participation active des parents
Durant la période de la petite enfance, les premiers acteurs qui apportent les expériences nécessaires au développement affectif et cognitif de l’enfant sont les parents. Il ne s’agit en aucun cas de s’approprier ce rôle et de rompre cette règle fondamentale du développement. Leur participation est indispensable. A ce propos, le programme d’éducation cognitive se présente comme un outil de médiation entre l’enfant et les parents. Il cherche simultanément à transmettre des outils à l’enfant et à la famille pour que ceux-ci puissent établir des échanges communicatifs réciproques adaptés. La participation active des parents leur permet d’obtenir des informations pratiques, des soutiens, des conseils afin d’être mieux préparés pour répondre aux besoins de leur enfant. Le programme leur offre aussi la possibilité d’échanger, de donner leur avis, de parler de leurs préoccupations et de se constituer comme acteurs et partenaires du projet d’intervention.
4. La disponibilité émotionnelle
Les origines communes des émotions et de l’intelligence exigent que soient réunis ces processus mentaux décrits comme cognitifs et ces qualités dites émotionnelles. (Greenspan 1998). Trop souvent reléguées au second plan, généralement ignorées par les modèles cognitifs, les émotions constituent des vecteurs puissants d’organisation mentale pouvant favoriser, orienter ou bloquer l’ensemble de l’activité mentale.
Plusieurs auteurs (Adrien, 1996; Bernstein; Shapiro et Herzig, 1993; Dawson et Lewy, 1989; Greenspan 1998; Trevarthen, 1989) soulignent un déficit de base d’expression et de régulation émotionnelle dans l’autisme. Cette réaction émotionnelle anormale empêcherait l’enfant autiste de bénéficier des échanges interpersonnels réciproques, le limiterait dans ses possibilités de faire des apprentissages par coopération, provoquerait une altération du développement de certaines fonctions cognitives, et nuirait à la production de ses actions spontanées. L’apparition des symptômes autistiques s’expliquerait donc d’abord par l’absence de ces expériences émotionnelles indispensables.
Le programme d’éducation cognitive participe au point de vue que les émotions sont à la base des apprentissages et qu’elles jouent un rôle fondamental dans l’organisation et le développement de la pensée. L’activation et la régulation des émotions sont nécessaires même si elles ne sont pas suffisantes pour expliquer le développement perturbé de l’intelligence.
Le programme d’intervention se donne donc pour objectif l’observation, la prise en compte et la stimulation des émotions en mettant à profit les intentions spontanées de l’enfant, l’état de disponibilité émotionnelle, la régulation et le déclenchement d’émotions porteuses. Le parent, partenaire privilégié et indispensable de la relation et des échanges affectifs, joue un rôle déterminant dans l’atteinte de cet objectif.
5. L’apprentissage à la communication
L’apprentissage à la communication est très caractéristique de l’approche. Le principe touche un des éléments centraux de l’autisme, à savoir l’impossibilité ou la difficulté de pouvoir entrer en contact, comprendre et communiquer avec autrui (et l’environnement) de manière générale. Les aspects communicatifs sont pris très tôt en considération et stimulés continuellement. Nous observerons la nécessité de travailler les échanges dans le rapport d’un enfant pour deux adultes, d’enseigner les cercles de communication et le langage actif, et d’utiliser le canal des émotions pour établir les premières productions langagières et maintenir la communication. D’autre part, nous veillerons, lorsque cela s’avérera nécessaire, à ne pas nous focaliser trop tôt sur le langage verbal mais davantage sur un système global de communication, et de recourir à une communication progressive intégrant l’expression gestuelle, l’utilisation d’objets, d’images ou de pictogrammes facilitant la communication.
6. Le pilotage des conduites
Il s’agit du principe de «l’enfant pilote» dans lequel le thérapeute prend le rôle secondaire mais indispensable de «copilote». Cette position secondaire de l’adulte ne s’apparente en aucun cas à la non-directivité; bien au contraire, elle doit favoriser l’orientation des processus mentaux adaptés à l’action en cours.
La démarche permet de maintenir un niveau de fonctionnement élémentaire de l’activité mentale de l’enfant, favorable au développement de l’intelligence. Le soutien s’ajuste au fur et à mesure des conduites. Le travail nécessite une bonne connaissance des processus impliqués dans les apprentissages et dans l’observation directe des démarches spontanées de l’enfant.
7. Les conduites adaptées aux buts
Ce principe se définit par l’importance pour l’enfant d’effectuer le plus possible des conduites en accord avec des buts. Pour cela, l’adulte s’assure que le but est mentalisé par l’enfant il l’accompagne dans ses démarches, l’oriente ou le réoriente sur le but, et soutient les conduites adaptées. Il peut s’agir de l’aider dans la prise d’information, de soutenir la participation et le maintien du regard, d’être attentif à l’attention portée sur les éléments pertinents de la tâche, de faciliter la régulation et l’organisation des actions. La finalité est l’utilisation de conduites adaptées à la réalisation d’un but.